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Culture

Zaho de Sagazan : « Dans ce studio, le temps semblait suspendu »

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De passage à Saint-Herblain, la chanteuse à la trajectoire fulgurante s’est confiée sur la lente gestation de son premier album : près de quatre ans d’un travail d’orfèvre effectués aux studios Terminus 3, un équipement géré, financé et animé par la Ville de Saint-Herblain. Rencontre.

Sweat à capuche et veste bariolée sur le dos, elle nous attendait patiemment dans le patio des studios Terminus 3, tout juste de retour de Paris et d’une sémillante prestation – comme toujours avec elle – au Zénith de la Villette. « Une communion musicale simple et heureuse. Dans ces moments-là, tu te sens en vie comme jamais », confie-t-elle. Quelques jours plus tôt, c’est au Zénith de Nantes qu’elle exposait devant 8 000 personnes acquises à la cause de ses émotions transfigurées. Le show d’une artiste à fleur de peau.

« Elle », c’est évidemment Zaho de Sagazan. La chanteuse aux multiples casquettes (autrice, compositrice, interprète, pianiste…) et multi-primée aux dernières Victoires de la musique était de retour à Terminus 3, ces studios de répétition et d’enregistrement gérés par la Ville, qu’elle et ses comparses musiciens d’Inuït, ont occupé durant quatre ans. « C’est ici que l’aventure a commencé, se rappelle l’enfant de Saint-Nazaire. C’est dans ces studios qu’on a passé des centaines d’heures à travailler ce qui deviendrait la matière musicale de la “Symphonie” ».

 

Portrait Zaho de Sagazan
Zaho de Sagazan, artiste polymorphe et multi-primée : « À Saint-Herblain, à T3, on a passé des jours entiers à rechercher les textures musicales de “La Symphonie des éclairs” » © Arno Lam

Alignement de planètes

Des journées et des nuits entières à vivre par et pour la musique, en quasi huit-clos, les contingences de la vie quotidienne pouvant attendre. De fait, arrivée à Nantes en 2019 pour suivre des études en gestion des entreprises et des administrations, Zaho de Sagazan se jette très vite à corps perdu dans la musique, « cet art hyper-complet qui a l’avantage de parler à tout le monde ». Une passion existentielle et dévorante, révélée à l’adolescence par la pratique du piano. Mais aussi par la puissance de cette voix naissante, grave et nébuleuse, et pourtant comme déjà patinée par le temps.

Les destins singuliers se révèlent souvent à l’occasion de clins d’œil favorables de la vie. Ceux de Zaho de Sagazan furent de deux sortes. Le premier releva de la rencontre, celle de Pierre Cheguillaume et Alexis Delong (très vite rejoints par Tom Geffray), maître artisans du crew nantais Inuït, un groupe de pop déjà bien connu sur la scène locale, suivi et accompagné par la Ville de Saint-Herblain depuis ses débuts. Passionné de recherches et d’expérimentations sonores, le binôme aura fait découvrir à l’artiste en herbes, l’étendue des promesses d’une musique électronique énigmatique et hypnonisante. « Avec eux, je me suis plongée dans un univers que je ne soupçonnais pas, se rappelle Zaho. Ils adorent défricher de nouvelles choses, ils ne se refusent rien. Quand je leur ai présenté mes premières chansons, ils ont tout de suite adhéré à mon projet. »

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Gérés par la Ville, les studios Terminus 3 offrent un cadre privilégié aux artistes amateurs et professionnels pour créer, répéter et mettre à l’épreuve leurs créations. C'est ici que Zaho de Sagazan a travaillé ses morceaux durant trois ans.

Le second clin d’œil fut de l’ordre du mentorat. Celui proposé par la Ville, à travers son pôle de musiques actuelles et ses studios de répétition et d’enregistrement Terminus 3, installés près d’Atlantis. Une pouponnière à jeunes artistes amateurs – jazz,  rock, rap, électro… l’éclectisme des styles musicaux est de mise – qui prennent ici le temps de construire leur discours musical. « Quand je l’ai entendue pour la première fois, j’en suis resté bouche bée, se remémore Jérôme Binet, qui coordonne les studios et assure la programmation musicale du théâtre ONYX et de la Maison des Arts. Il était évident qu’il fallait la soutenir et l’accompagner dans la création de ce premier album. » (lire encadré).

Résidence permanente aux studios T3, aides financières à la création discographique ou à la visibilité internationale, programmation au théâtre ONYX… : entre 2020 et 2023, la Ville s’attache, à travers l’accompagnement de Jérôme Binet, à faire connaître cette très jeune artiste encore inconnue au bataillon des mélomanes de musiques électroniques à textes.

De leurs côtés, Zaho et ses camarades passent des heures dans ces « studios rêvés pour de jeunes artistes ». Des heures à modeler la matière de la “Symphonie”. Des heures immergées dans la grammaire d’une musique électronique sans frontières, couturée de synthétiseurs modulaires et autres boîtes à rythmes. « Je suis du genre perfectionniste, un peu control freaks, alors on a pris notre temps pour expérimenter, chercher des voies inattendues et originales. Je voulais livrer un album parfaitement abouti, en tout cas de mon point de vue. » 

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"Avec la Symphonie, on a pris notre temps pour expérimenter, chercher des voies inattendues et originales".

Temps suspendu

Quatre ans de créativité heureuse et fertile donc, durant lesquels Zaho de Sagazan aura patiemment ciselé sa « Symphonie des éclairs », sa diction, ses textes entre ombre et lumière (la parenté avec Barbara est assumée), et ses sonorités électroniques ténébreuses, inspirées des audaces berlinoises. « Sans ce lieu, les choses auraient été beaucoup plus compliquées pour murir notre projet, confie-t-elle. Ici, on a pu travailler comme bon nous semblait, pour un loyer dérisoire. Seuls dans ce studio, le temps semblait suspendu. »

La suite est connue. Des concerts qui s’enchaînent, en première partie de Mansfield Tya, d’Hervé ou de Stromae. Cet amour naissant et déjà immodéré de la scène, avec les frissons qu’elle procure. Des prestations tellement habitées qu’elles laissent souvent pantois celles et ceux qui la voient pour la première fois. Et puis finalement, la sortie de ce premier album, en mars 2023, un jaillissement poético-électronique très vite encensé par la critique.

Après 115 concerts en 2023 (un live tous les 3 jours), deux zénith début 2024, l’artiste s’apprête à vivre une année 2024 sur les chapeaux de roue : 30 concerts en festival d’été, 15 en zénith avant une grande tournée internationale. « Malgré ce qui nous arrive, nous restons ce que nous avons toujours été : une bande de copains qui se plaît à faire de la musique et à raconter des histoires qui parlent aux gens. »         

Le soutien de la Ville de Saint-Herblain, en 5 dates

  • 2020 : début de l’accompagnement en 2020. Accueil de Zaho de Sagazan comme artiste résidente à T3 ;
  • 2021 : aide à la création discographique de 2000 €. Mise à disposition d’un studio de production à l’année et accompagnement par le dispositif TRAME ;
  • 2022 : programmation de l’artiste pour un concert au théâtre ONYX. Présence au concert de solidarité à l’Ukraine, le 6 mai 2022, à la salle de la Carrière ;
  • 2023 : aide de 3 000 € pour donner de la visibilité (attaché de presse et mobilisation de professionnelle) à son projet de concert aux Francofolies de Montréal dans le cadre du dispositif TRAME (contrat de filière) ;
  • 2024 : 10 jours de travail d’arrangement à T3 pour la tournée des Zénith débutée le 11 mars 2024.