
Petite enfance, enfance et jeunesse
Un clip pour faire tomber les a-priori
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Des élèves de 5e du collège herblinois Gutenberg et des jeunes de l’Institut d’éducation motrice de La Chapelle-sur-Erdre ont mené un projet ensemble : écrire une chanson, la traduire en langue des signes puis la décliner sous la forme d’un clip sur la diversité. Moteur ! Ça tourne.
“ Aujourd’hui, ce n’est pas vos voix qui comptent, mais vos gestes ”, lance Hortense Moutard, professeure de musique au collège Gutenberg. Face à elle, neuf collégiennes et collégiens de 5e et quatre jeunes de l’Institut d’éducation motrice (IEM) de La Buissonnière sont en pleine répétition. Ils s’apprêtent à enregistrer ensemble et en langue des signes le clip de leur chanson Twamwanou. Un projet né de ces hasards qui font bien les choses.
“ Au détour d’une conversation avec la mère d’une élève, j’apprends qu’elle travaille dans un IEM, raconte Awa Diack, professeure d’anglais à Gutenberg. Le collège mène régulièrement des projets autour de la diversité. L’opportunité d’une collaboration était trop belle pour ne pas la saisir. ” L’idée germe alors de réunir les collégiens et les jeunes de l’IEM autour d’un projet : l’écriture d’une chanson sur laquelle les élèves de 5e travaillent en cours d’éducation musicale.
Chanter, ça se fait ensemble, ça crée une unité qui s’affranchit des différences.
Contacts pris, les équipes éducatives des deux établissements tricotent ce projet au long cours qui a débuté à l’hiver 2024. “ Les collégiens ont produit des vidéos pour se présenter, accueilli les jeunes de l’IEM au sein du collège, planché sur l’écriture de la chanson et sa mise en musique, rapporte la professeure d’anglais. La chanson a été écrite après de riches débats en classe sur l’ouverture aux autres, sur l’identité, la nécessité de trouver son ancrage pour mieux aller vers l’autre. ”
Côté IEM, les jeunes ont pris leur part. “ Ils ont entre 9 et 13 ans, et présentent plusieurs handicaps moteurs mais aussi psychiques, explique Loriane Omnes, éducatrice spécialisée. Ce qui ne les empêche pas d’être en inclusion, une fois par semaine, dans une école élémentaire. ”
Pour Sandrine Poizot, enseignante spécialisée à La Buissonnière, ce projet avec le collège Gutenberg “ est une aubaine, ça apporte beaucoup aux jeunes en termes d’ouverture sociale.”
Un travail a dû être mené en amont pour faciliter la rencontre. En effet la plupart des jeunes du groupe Léonard-de-Vinci ne sont pas en capacité de formuler des phrases et sont obligés de recourir aux signes, aux pictogrammes ou à la synthèse vocale pour s’exprimer. Autant d’outils qu’ils ont utilisés pour se présenter en vidéo et accueillir, à leur tour, les collégiens de Gutenberg, le 4 mars dernier. Ce jour-là, ils ont pu faire découvrir un peu de leur quotidien fait d’enseignements adaptés, de séances de motricité, de jeux… et tourner le clip de la chanson travaillée en langage des signes.
Le chant signé permet de rendre les jeunes de l’IEM acteurs du moment. Eux aussi ont un savoir à partager. Et cette réciprocité est importante.
Le jour du tournage, l’émotion est grande. Rayda laisse couler quelques larmes à l’arrivée des collégiens dans son IME. C’est sa manière d’exprimer sa joie. Esteban, collégien volubile, raconte : “ Je pourrais rester là avec eux. Même s’ils ne parlent pas tous, on peut inventer de nouvelles choses à faire ensemble. ” Il n’a pas mis longtemps à nouer une complicité avec l’un des jeunes de l’IME qui use de la synthèse vocale pour partager de bonnes blagues.
Shéryna raconte que c’est sa maman qui travaille ici. Alors le handicap, elle connait un peu. Elle avait envie de partager ce moment avec ses professeurs et ses camarades de classe. “ Ça m’apporte beaucoup de joie de faire ça, dit-elle. Malgré leur handicap, on peut communiquer et ça, c’est chouette. Il faut le dire à tout le monde. ” Jordan regarde les collégiens avec des yeux aussi grands que son sourire. À ses côtés, May qui n’ose pas trop raconter ce qu’elle pense, lui tend la main.
“ Certains sont en contact avec le monde du handicap, d’autres pas du tout, explique Awa Diack, bien décidée à réitérer l’expérience. Ce type de rencontres permet d’enlever la part d’imaginaire qu’il peut y avoir autour du handicap. Ça contribue à ouvrir leur vision de l’humanité… ”