
Urbanisme, aménagement, travaux
Les Maisons Castors à la Petite Durantière
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C’est une histoire qui est restée gravée dans les mémoires : l’aventure des maisons Castors.
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Après la Seconde Guerre mondiale, le besoin de logements se fait sentir sur l’ensemble du territoire français. Les gens vivent entassés dans des logements trop petits, voire même dans des abris de fortune. Pour tenter d’améliorer leurs conditions de vie, les foyers à revenus modestes décident de passer à l’action et de construire par eux-mêmes leurs maisons. Le mouvement coopératif des Castors dit “d’auto-construction” voit le jour.
Né en Suède en 1927, les Castors essaiment en Europe, au Canada, en URSS (devenue depuis la Russie) atteignent Saint-Étienne et Pessac dans les années 1930. Dans la région nantaise, l’aventure des Castors débute à Rezé, avec la construction des 101 maisons de la Balinière entre 1950 et 1954. À Saint-Herblain, les Castors vont bâtir les leurs dans le quartier de la Garotterie. Le lotissement est dénommé “La petite Durantière ” et comprend 3 groupes de maisons.
Les grandes valeurs qui traversent ce mouvement d’initiative populaire sont le travail, la solidarité, le courage que l’on retrouve dans les noms de rues de certaines cités de Castors à Pessac, Saint-Pol de Léon, etc. À Saint-Herblain, elles s’appelleront avenues de la République, de la Liberté, de la Concorde.
Pour compenser le manque de fonds propres des foyers modestes, la notion d’apport travail est prise en compte. Il faut en moyenne de 2 à 5 ans à un ouvrier pour construire sa maison sachant qu’il devra contribuer à hauteur de 650 heures prises sur son temps libre. Les familles ouvrières se serrent les coudes. Chacun met la main à la pâte en fonction de ses compétences et de ses capacités physiques : certains s’occupent du terrassement, du défrichement tandis que d’autres vont travailler sur l’installation des réseaux, la construction et les dossiers administratifs… Le Comité ouvrier du logement de Nantes, à travers son bureau d’études techniques, accompagne les Castors dans leur projet et dans l’exécution des plans des maisons.
“ Les Castors étaient fiers d’être propriétaires de leur pavillon”, se souvient l’Herblinois Guy Rivet dont le papa Georges construisit la maison familiale à la petite Durantière. Lysiane Robin, Herblinoise elle aussi et fille de Castors, a vécu de 1960 à 1973 dans la maison de ses parents. “Ma mère a encouragé mon père ouvrier chez Béghin-Say à se lancer dans l’aventure. Il faisait les 3-8 et quand il terminait à 14h30, il était chargé avec d’autres de tremper la charpente des futures maisons dans du Crésyl, un désinfectant bactéricide et fongicide.”
Chaque maison était bâtie en parpaings avec un plan très fonctionnel comprenant deux ou trois chambres, un salon-séjour, une cuisine, une salle d’eau, des WC, des placards. Toutes étaient raccordées aux réseaux d’eau et électrique. Georges Rivet, comme tous les Castors, travaillera tous les samedis et dimanches pendant 4 années pour construire sa maison et participer à l’édification du lotissement. L’État décrétera la fin du mouvement des Castors avec la loi Chalandon de 1971. Après la disparition des constructeurs historiques, nombreux sont les enfants et petits-enfants à avoir conservé le patrimoine bâti par leurs parents ou grands-parents.
La construction des maisons Castors de la petite Durantière a rapproché les habitantes et habitants. Une joyeuse fanfare “Les Bigophones” voit le jour au cours des années 1950-1960. Sachant tout faire, les musiciennes et musiciens amateurs construisent eux-mêmes leurs trompettes en fer blanc. Pendant de nombreuses années, ils joueront de la musique ensemble et rejoindront le défilé de la mi-carême dans les rues de Nantes déguisés selon un thème différent chaque année.